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À QUI PROFITE LE PLUS L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR? L’INDIVIDU OU LA SOCIÉTÉ?

Le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) vient de publier une étude intitulée Éducation et frais de scolarité. Elle a été menée par deux professeurs d’économique de l’UdM,  Rui Castro et Michel Potvin. Ils ont bénéficié des conseils de Robert Lacroix, Claude Montmarquette et François Vaillancourt. Les deux premiers ne font certainement pas partie de la même famille d’esprit que Michel Seymour! Qu’importe, leur réflexion est intéressante. Leur étude  mérite certainement attention.

Ils résument ainsi leurs constats: :

  1.  Les rendements privés de l’éducation supérieure sont importants, de l’ordre de 11% par année.
  2. Les bénéfices sociaux de l’éducation, excluant les rendements privés, ont été estimés dans l’intervalle de 3 à 7%
  3. L’étudiant retire plus de 60% des bénéfices totaux de l’éducation : la société en retire moins de 40%.
  4. Les contraintes financières des étudiants ne sont pas le principal frein à l’accessibilité des études supérieures.
  5.  Les habiletés de l’étudiant au secondaire, ses environnements familial et social, le niveau d’éducation des parents constituent des obstacles importants à l’accessibilité. »

Les auteurs tirent de cette conclusion (la 3e principalement) que la thèse voulant que l’éducation doive être gratuite, parce que c’est la société qui en bénéficie, ne tient pas la route.

Le rendement privé de l’éducation (conclusion 1) est assez facile à mesurer. Il est lié au revenu plus grand qu’entraîne pour un individu une scolarité plus longue. Quant aux bénéfices sociaux, il se calcule d’abord en fonction de la  productivité d’une société donnée. Ils peuvent aussi se mesurer à partir d’autres critères comme  un taux de criminalité moins élevé, le taux de participation aux élections, etc. Mais ici, l’impact d’une scolarité universitaire n’est toujours évident. Même pour ce qui est de la productivité,  la scolarité de niveau secondaire, disent les deux économistes, est plus importante.

Ceci dit, les deux auteurs ont calculé par ailleurs que la « juste part » que devraient payer les étudiants est de 33% de ce qu’il en coûte pour assurer leur formation. Mais comme ce coût n’est pas le même selon les disciplines, ils recommandent de moduler les droits de scolarité en fonction de ce coût, formule qui semble avoir des avocats au Sommet. Ainsi, les droits exigés en médecine vétérinaire seraient de 15 386$, soit les plus élevés, et 2137$ en lettres, soit les moins élevés. Ainsi, la majorité des étudiants ne paieraient pas plus que ce qu’ils paient maintenant.

J’ajouterais pour ma part que la perspective économique, toute intéressante et pertinente qu’elle soit, n’épuise pas toute la réalité humaine. Le bonheur des gens et des sociétés est aussi fait d’impondérable. La connaissance et la culture me semblent être l’un d’eux. S’il y a des économistes parmi mes lecteurs, il serait bien intéressant de lire leur point de vue.